Pacific Encounters

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FIRST and EARLY ENCOUNTERS between Pacific Peoples and Europeans
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Journal du brick de sa Majesté l'Assistant, dans la baie de Matavia

9 avril – 7 mai 1792

 Nathaniel Portlock

 

 Le deuxième voyage du capitaine Bligh à la recherche d’arbres à pain.

Traduction (inédite) de la transcription (pour la première fois) du journal de Portlock, sous la direction de Prof. Anne Salmond

 


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Le brick de sa Majesté l'Assistant lors de son voyage à Otahiti.

le lundi 9 avril 1792

 

Brise modérée avec temps agréable et clair avec nuages. A cinq heures et demie, de petites averses de pluie, nous lovâmes de nouveau le câble de la petite ancre d’affourche, fîmes voile et réduisîmes la toile de temps à autre afin de garder notre position. En courant sur l’île, le commandant montra ses couleurs, nous fîmes de même. A quatre heures, la masse de l’île nous restait par sud-34°-est à une distance de 3 ou 4 milles. A quatre heures et demie, nous avions dépassé l’île et étions sans doute à 4 ou 5 milles sous son vent lorsque nous aperçûmes des pirogues qui avançaient à la pagaie, venant du rivage en direction des navires. Le commandant mit en panne immédiatement, nous fîmes de même. A cinq heures, trois ou quatre pirogues avaient rejoint le commandant, portant des noix de coco et des plantains à vendre. Le commandantacheta ceux-ci et m’en donna une partie à transporter à bord de l’Assistant ; nous éventâmes nos huniers et fîmes route au sud sous le vent de l’île. A six heures, les pirogues nous quittèrent et nous remontâmes au vent et poursuivîmes notre route. Nous apprîmes d’un homme qui semblait être un chef que deux vaisseaux anglais avaient fait relâche ici il y environ trois mois en route pour Otahiti. J’en conclus que ces vaisseaux furent le Discovery et le Chatham. A six heures, la masse de l’île nous restait à l’est-quart-nord-est à une distance de 4 ou 5 milles. Perroquets et bonnettes. A huit heures, brises fraîches et temps clair avec nuages.  A neuf heures et demie, avec perroquets et bonnettes et un premier ris dans les huniers. A minuit, brises fraîches en rafales avec de grosses averses de pluie. A une heure du matin, vent frais en rafales. Nous prîmes un deuxième ris et carguâmes le hunier. A quatre heures, brises fraîches et temps clair avec nuages [illisible] il faisait jour, nous aperçûmes la partie est d'Otahiti qui nous restait au sud-ouest à une distance d’environ 6 lieues. Nous serrâmes le vent [illisible], et prîmes deux ris dans les huniers. Vers 7 heures, nous tirâmes des bords en direction du sud. A huit heures, les extrémités d'Otahiti étaient en vue entre ouest-quart-sud-ouest et nord-est [illisible] à environ 4 lieues et la masse de l’île de Morea à l’ouest-quart-nord-ouest à huit ou neuf lieues. A huit heures et demie, comme le temps paraissait plus stable, nous remontâmes au vent et fîmes route pour la baie de Matavia. A dix heures, brises fraîches et temps clair avec nuages ; nous rangions la côte en direction de la pointe Vénus.  Nous amenâmes notre pavillon [illisible] avec le commandant ; j’en profitai pour lire à l’équipage les règles que le commandant avait jugé nécessaire de respecter pendant que nous étions dans les mers du Sud.  A 11 heures, nous approchions de la pointe Vénus ; nous carguâmes les bonnettes et après avoir passé devant la pointe Vénus et le Dolphin Bank, nous tirâmes plusieurs bords afin de rentrer dans un mouillage dans la partie supérieure de la baie. En partant me coucher, je découvris que nous avions devancé le Providence d'une bonne distance en naviguant. Le Providence dérivait beaucoup en [illisible] et travaillait très mal. J’attribue cela au fait qu’il est trop léger. Avant de jeter l’ancre, nous fûmes rejoints par une baleinière anglaise avec sept membres d’équipage à bord. J’imaginai qu’elle appartenait à un navire à l’ancre dans le havre d'Oparre. A 11 heures et demie, le commandant jeta l’ancre et nous fîmes de même.  Tout de suite après, avec la meilleure ancre de bossoir par 7 brasses d’eau fond de sable et de boue noires, nous fûmes [illisible] entourés par de nombreuses pirogues remplies de naturels qui manifestèrent leur amitié pour notre honorable commandant dans le grand bonheur qu’ils ressentaient de le revoir et de l’avoir de nouveau chez eux. J’allai immédiatement présenter mes respects au commandant et j’appris que le bateau et les gens mentionnés ci-dessus appartenaient à la Matilda, navire marchand, capitaine Mathew Weatherhead, de Londres, dernière escale Port Jackson en Nouvelle Galle du Sud où il avait transporté 230 prisonniers ; il avait fait relâche sur l’île et jeté l’ancre dans la baie de Oitepeha afin d’obtenir des rafraîchissements pour l’équipage et de pouvoir poursuivre son voyage jusqu’à la côte de Macao à la recherche de cachalots.  8 jours après leur départ de cette île, le navire [illisible] sur un récif au large d’une île basse gisant, d’après leurs dires, par latitude sud et longitude est de Greenwich. Heureusement, ils (32 hommes en tout) avaient pu se réfugier dans leurs bateaux (4) et faire route sur cette île ; au passage, ils firent relâche à Metea où ils restèrent très peu de temps ; la nuit de leur départ de Metea, ils eurent du très mauvais temps et tous les bateaux furent séparés. Trois d’entre eux se retrouvèrent sur la côte nord de l’île, et l’autre sur la côte sud. Les gens qui arrivèrent à Matavia furent rapidement saisis par les naturels, leurs bateaux hissés sur la grève et eux en grande partie déshabillés mais sans subir d’autre violence ; au contraire, ils furent bien nourris et on leur fournit de l’étoffe d'Otahiti à porter à la place de leurs propres vêtements. Le bateau qui se retrouva au sud rangea la côte jusqu’à Atahora et là, les gens connurent le même sort que leurs compagnons de bord avaient subi au nord  ; ensuite, ils furent tout aussi bien traités. Très peu de temps après avoir jeté l’ancre, nous reçûmes à bord la visite d'Edea, la reine, et d'Oropia, le frère du roi, accompagnés du vieux Totahaw, grand-prêtre et ministre, et de plusieurs autres personnes mais avant leur arrivée, un M. Norris, chirurgien à bord de la Matilda, fit son apparition. Ce monsieur (avec un certain Conner) a, paraît-il, élu domicile chez Tubira, un ratira de Matavia, contre la volonté de la reine et des chefs d'Oparre qui étaient devenus les amis du capitaine et de tous les gens (dès qu’ils purent distinguer les chefs de la populace) qui se retrouvèrent de ce côté-ci de l’île. A la demande du commandant et d’autres qui étaient à Oparre, les chefs prièrent Po’e’enoe, le chef de Matavia, et d’autres personnes du district, de rendre les vêtements qui avaient été pris aux gens de Britannia (avec d’autres biens tels l’argent et les armes) mais cette demande fut refusée ; par suite de quoi, une guerre eut lieu et il semble assez évident que messieurs Norris et Connor y participèrent avec ceux de Matavia contre les gens d'Oparre et se servirent de leurs armes. La conséquence fut qu'Orepia faillit être abattu par Norris et que le chef d'Oparre insista, à ce moment-là, pour que tous les Anglais se battissent de leur côté, puisque la guerre avait éclaté à cause des Anglais (et de leurs biens) qui étaient restés à Oparre et que Norris et Connor avaient pris les armes contre eux. Marshall, le second, et d’autres [illisible] qu’ils auraient pu abattre Norris ou Connor à la première occasion car, selon leurs dires, Norris avait écrit à Marshall demandant que lui ou quelqu’un d’autre de son parti [illisible] avec les gens d'Oparre et avait déclaré que Connor et lui-même avaient l’intention de rester tout à fait [illisible] ; [illisible] peu de doute que notre arrivée avait empêché une effusion de sang entre Anglais. Le commandant [illisible] tous (à part M. Norris à qui il donna l’ordre ou plutôt la permission de rester au poste qu’il comptait établir sur le rivage près de la pointe Vénus) de conserver de bonnes relations avec les naturels et de s'abstenir de leur donner la moindre assistance dans leur guerre. Il y eut quelques escarmouches entre les gens d'Oparre et ceux de Matavia sur la plage et aux abords du bois mais rien de grave ne se passa d’un côté ou de l’autre et, d’après ce que m’ont appris les gens de la baleinière et en général certains d’entre eux avaient assisté aux assauts, leurs batailles ne sont pas très sanglantes et pendant les 10 ou 12 jours qu’ils passèrent à guerroyer [illisible] peu de personnes d’un côté ou de l’autre furent tuées. Il semble assez évident que tout prisonnier capturé est automatiquement mis à mort. Le capitaine de la Matilda, avec quatre autres hommes, avait pris passage et était parti à bord de la goélette Jenny, de Bristol, capitaine Baker, à destination de la côte nord-ouest de l’Amérique pour faire du commerce ; le second, un certain M. Campbell, et deux autres partirent à bord d’un des baleiniers pour Port Jackson.

 

 

Baie de Matavia, Otahiti. Le mardi 10 avril 1792.

 

Pendant toutes ces dernières 24 heures, brises d’est modérées avec temps agréable. A deux heures de l’après-midi, nous mouillâmes le navire avec un demi câble sur la meilleure ancre de bossoir à l’est, la pointe Vénus étant au nord-10°-est, One Tree Hill au sud-89°-ouest et la pointe la plus à l’ouest en vue au sud-69°-ouest, le navire étant mouillé par environ 8 brasses d’eau ; nous séchâmes et déverguâmes les bonnettes et les perroquets. Des pirogues commencent à affluer autour de nous mais les naturels ne sont pas nombreux du tout car cette guerre empêche tous les gens de Matavia de venir. Nous arrêtâmes de servir des salaisons en raison de l’abondance de beaux cochons et de fruits à pain. Petit à petit, nous recevons les nouvelles de l’île, dont celle concrète et agréable de la réussite du capitaine Edwards à bord du navire de sa Majesté la Pandora, (qui fut envoyé expressément pour capturer les mutinés du Bounty) ; il en prit 14 dans les districts de Matavia et de Papara ; parmi ceux-ci figurent deux aspirants, Heywood et Stewart. Nous supposons que Christian et les 10 autres sont partis à bord du Bounty mais où nous ne le savons pas encore ; Brown, l’homme laissé ici par M. Cox, est aussi rentré à bord de la Pandora. Le Discovery et le Chatham ont également fait relâche ici en route pour la côte nord-ouest de l’Amérique ; je n’ai entendu parler d’aucun problème ou d’accident qui leur serait arrivé pendant leur escale ici.

 

Baie de Matavia,  Otahiti.  Le mercredi 11 avril 1792.

 

Pendant toutes ces dernières 24 heures, brises d’est modérées avec temps agréable.  L’équipage occupé à faire de l’étoupe, à nettoyer l’avant et l’arrière du navire et à remonter du sel de la cale arrière. Cette après-midi, les partis en guerre étaient sur les plaines de Matavia où ils continuèrent à s’engager dans des escarmouches pendant quelque temps ; finalement, vers 4 heures, ils s’affrontèrent assez violemment à l’aide de lances, de pierres envoyés d’une fronde (en cela, ils sont très habiles) et au tir (car chaque parti avait plusieurs fusils). La bataille fut assez intense pendant une bonne demie heure ; ensuite, les gens de Matavia commencèrent à céder et peu après, lorsqu’une balle tirée par un des gens d'Oparre blessa à la tête l’un d’entre eux, ils cédèrent de partout et s’enfuirent dans leurs montagnes qui avoisinent la bordure des basses terres. Ils furent poursuivis par les gens d'Oparre pendant quelque temps et nous entendîmes de fréquentes détonations de fusils ; en effet, du navire j’aperçus une partie de ceux de Matavia, parmi lesquels il y avait Tubira, qui en traversant les montagnes faisaient de brèves haltes pour faire feu sur le parti opposé qui les poursuivait. Le soir, quand les chefs revinrent après la poursuite, ils nous apprirent que Tubira qui semble être leur principal guerrier, avec la plupart du parti, avait battu en retraite à Opi’ano, un district quelques 8 milles à l’est de Matavia.

 

Baie de Matavia, Otahiti. Le jeudi 12 avril 1792.


Pendant toutes ces dernières 24 heures, brises d’est et d’est-sud-est modérées avec beau temps. L’équipage occupé à faire de l’étoupe et à dégager les ponts après avoir descendu la chaloupe et les petits canots. Nous recevons une abondante provision de cochons, de fruits à pain et de noix de coco de la part des naturels. Les gens d'Oparre semblent considérer ceux de Matavia totalement repoussés et plusieurs d’entre eux ont commencé à profiter de leur absence car ils sont en train de démonter le peu de  maisons qui ont échappé aux ravages de la guerre et des incendies et de les charger sur leurs pirogues pour les transporter à Oparre

 

Vendredi 13 avril 1792.


Brises du sud-est et de l’est-quart-sud-est modérées avec temps agréable pendant toutes ces dernières 24 heures. J’employai l’équipage aux tâches nécessaires à bord. A 1 heure, j’aperçus un Indien sur le câble en train d’essayer de voler une veste ; en étant découvert, il sauta à l’eau ; j’envoyai un bateau le chercher et l’amenai au Providence où il reçut une petite punition et fut renvoyé. J’envoyai le cotre à terre armé pour l’aiguade ; certains membres de l’équipage occupés à faire de l’étoupe en préparation du calfatage des flancs. A 8 heures, il y avait un Indien sous la proue essayant de monter par les câbles. Je le poursuivis moi-même avec les bateaux ; il nagea vers la plage et, en plongeant de façon étonnante bien que blessé à la tête par la gaffe, il aurait gagné le rivage avant les bateaux si un Indien, du nom de My’de’de à qui le capitaine Bligh permet de rester constamment à bord et qui était dans le bateau avec moi, n’avait pas sauté à l’eau et attrapé le bougre. [illisible] le second occupé à [illisible] du cabestan, les charpentiers employés à faire [illisible], des membres d’équipage à faire de l’étoupe. Je déployai les basses voiles pour les sécher ; j’ai été [illisible] envoyer les [illisible] à Oparre, car il a [illisible] en connaissant [illisible] restant pour les protéger eux et les gens qui auront la tâche de les obtenir, il [illisible] que l’on peut sans danger se risquer à faire entrer le Providence.  En effet, ce n’est pas très difficile d’entrer mais [illisible]  pour sortir un navire tel que celui-là car il n’y pas plus de 5 brasses d’eau bien que [illisible] l’alizé dominant et sans lui la navigation est en vérité dangereuse [illisible] des bancs de corail dont la position n’est pas pour le moment bien connue. Aujourd’hui, nous n’avons pas eu beaucoup de visiteurs mais ceux qui viennent nous apportent une bonne provision de cochons, de fruits à pain, de ave ou pommes et de beaux plantains.

 

Le brick de sa Majesté l'Assistant,en compagnie du navire de sa Majesté le Providence.

Baie de Matavia. Le samedi 14 avril 1792.

 

Pendant la majorité de ces dernières 24 heures, des brises d’est modérées avec un beau temps agréable. De nombreuses pirogues quittèrent le rivage pour venir au navire avec des cochons et une abondance de noix de coco, de plantains, de fruits à pain et, en fait, de la plupart des produits de cette île. Edea, Orepia et d’autres chefs à bord du Providence, [illisible] aujourd’hui j’ai reçu un présent de la part d'Orepia, le seul depuis notre arrivée : il était composé d’un cochon de taille moyenne, environ deux douzaines de noix de coco et des fruits à pain préparés. Orepia resta avec moi quelque temps avant de prendre congé et monter à bord du vaisseau du commandant . Dans l’après-midi, je remarquai plusieurs pirogues chargées de bois et de beaucoup de bambou, quelques radeaux également, se dirigeant vers Oparre ; lorsque je me renseignai, j’appris que c’était le butin des plaines désertées de Matavia. Le soir, j’accompagnai le commandant et Orepia à la pointe Vénus ; comme il faisait presque nuit, nous ne débarquâmes pas. Orepia indiqua un endroit pour le poste que le commandant trouva bon ; selon Orepia, il était près du lieu où avait été installé celui du Discovery. Nous remontâmes à bord à la tombée de la nuit ; pendant la nuit, nous eûmes un temps calme, chaud et lourd. Les naturels ont un comportement fort gentil : Orepia a l’intention de dormir à la pointe Vénus ce soir afin d’être présent demain matin pour voir les désirs du commandant réalisés et le terrain dégagé et nettoyé à l’endroit où il a l’intention de faire monter la maison des plantes et les maisons pour recevoir le détachement qui sera à terre. Le commandant envoya des provisions à terre pour son dîner. A six heures du matin, le commandant vint me chercher et je l’accompagnai à terre à la pointe Vénus. Nous y fûmes reçus par Orepia et le commandant décida alors d’abandonner l’idée de se procurer des plantes à Oparre et choisit Matavia et sa région pour ces besoins. Il indiqua donc un lieu pour y construire la maison des plantes et deux maisons pour recevoir le détachement des navires. Orepia donna immédiatement des instructions pour dégager le terrain et, en très peu de temps, de nombreuses personnes étaient occupées au travail de construction. Entre sept et huit heures, M. Norris, le chirurgien de l’ancien vaisseau la Matilda, accompagné d’un ou deux hommes d'Oparre, se rendit à la résidence de Poenoie et Tupira pour exiger l’argent et d’autres choses qui avaient été pillés chez les gens de la Matilda. Vers 8 heures, nous remontâmes à bord ; Orepia resta à terre pour diriger et faire avancer les travaux de construction des maisons ; le vieux Tootahaw, le grand-prêtre, m’accompagna à bord de l’Assistant avec un présent d’un cochon et des noix de coco. Je lui en fis un beau en retour, qui lui fit grand plaisir. Ce vieillard est une personne de conséquence ici et fait partie des hommes les plus intelligents de l’île.  Il a appris plusieurs mots anglais qu’il prononce assez bien et il est ravi quand il trouve quelqu’un pour lui en apprendre.
Vers midi, plusieurs pirogues sur la plage en train de charger du butin tel du bois et des pans entiers de maisons.
Certains membres d'équipage occupés à saler du porc et d’autres à faire de l’étoupe, les charpentiers à faire des boîtes pour protéger les percuteurs des pièces de trois livres. A midi, brises d’est faibles avec un temps chaud et lourd.

 

Le brick de sa Majesté l'Assistant, baie de Matavia, Otahiti.
Le dimanche 15 avril 1792.


Après-midi : petite brise d’est avec beau temps agréable. L’équipage occupé à faire de l’étoupe, à saler du porc et à faire des [illisible] pour les percuteurs des canons à pivot et des espingoles. A 4 heures de l’après-midi, une pirogue accosta avec du butin de Matavia. Pendant la nuit, temps calme et très chaud. A 7 heures du matin, je montai à bord du navire du commandant. J’y trouvai M. Norris avec lui ; il venait de rentrer de l’actuelle résidence de Poenoe et Tubira.  Il les avait trouvés à environ 6 milles à l’est de Matavia ; il était parvenu à obtenir seulement 16 dollars qu’il affirme sont les siens et, je crois, 3 ou 4 appartenant au capitaine du navire ; le reste du butin, disent-ils, a été convoyé dans une petite île appelée [illisible] qui se situe à environ 6 lieues au nord-ouest de celle-ci.  Poenoe paraît très découragé et redoute grandement le mécontentement du capitaine Bligh. Son parti possèdent, je pense, 4 armes à feu ; M. Norris avait pour consigne de leur demander de les rendre mais les chefs refusèrent absolument de le faire, disant qu’ils ne pouvaient compter sur rien d’autre pour récupérer leurs biens ; en même temps, ils observèrent que si les gens d'Oparre et d’autres districts rendaient les leurs, ils feraient immédiatement de même. Orepia dormit (footnote: probablement erreur pour 'dîna') avec nous et ensuite prit congé ; il dort à la pointe Vénus afin d’être prêt le matin pour voir le travail s’effectuer. Ce matin, une faible brise d’ouest et du temps chaud ; nous obtenons une bonne provision de cochons et de toutes les autres denrées, et à un prix bien plus raisonnable que ce que l’on pouvait espérer vu les quantités qui ont dû être emportées par les différents navires. Nous obtînmes un beau cochon pesant 150 livres pour six pennies ou une hachette de huit pennies, une dizaine ou une douzaine de fruits à pain pour un clou à doublage et autant de noix de coco pour un de ces mêmes clous. Je pense que c’est moins cher que lorsqu’on était ici à bord du Resolution et du Discovery. A midi, il faisait chaud.  Dieu soit loué, tout va bien à bord.

 

Le brick de sa Majesté l’Assistant dans la baie de Matavia, Otahiti. Le 16 avril 1792.


Une faible brise d’ouest avec temps agréable, peu de pirogues mais nous continuons à recevoir une bonne provision de vivres. J’ai tendance à penser que la plupart des gens d'Oparre sont occupées au pillage. Afin de faire durer nos alcools et de se prémunir contre tout accident, le commandant a décidé de faire servir du grog seulement trois fois par semaine, c’est-à-dire le dimanche, le mardi et le vendredi. Le grog est un article dont on peut très bien se passer ici où chaque homme a autant de belles noix de coco qu’il désire et le lait de la noix de coco, avant que l’amande ne durcisse et ne se raffermisse, est extrêmement agréable à boire. Vers cinq heures de l’après-midi, j’accompagnai le commandant à terre où nous découvrîmes qu'Orepia avait bien avancé dans la construction des deux maisons pour recevoir le détachement ; il a aussi terminé la maison, ou l’abri, pour les plantes. Il avait bâti une petite maison à l’usage des officiers un peu trop près de la rivière et le commandant demanda à ce qu’elle fût déplacée sur le même terrain où se trouvait la maison destinée aux seconds maîtres et aux soldats de marine. Orepia promit de le faire faire le lendemain matin. Vers 6 heures nous remontâmes à bord ; pendant la nuit, une faible brise d’est avec beau temps. Vers 7 heures du matin, les fusiliers marins de chaque navire furent envoyés à terre au poste ; le détachement se composait de 25 hommes, comprenant un lieutenant de marine, un lieutenant de fusiliers marins et trois seconds maîtres. Ils furent reçus à terre par les naturels qui semblaient tout à fait aimables et satisfaits. Le matin, le charpentier était occupé à faire un coffre à armes pour le cotre, certains membres d’équipage à faire de l’étoupe et le reste à ranger et à nettoyer le navire.

 

Le brick de sa Majesté l'Assistant. Otahiti. Le 17 avril 1792.


Après-midi : une faible brise d’ouest avec un temps nuageux et lourd. Le soir, le vent vira à l’est et souffla en petites brises faibles, mais le ciel se dégagea.  A 2 heures de l’après-midi, le roi qui portait autrefois le nom de Otoo et qui s’appelle maintenant Tynaa (son fils aîné prenant le nom de Otoo) passa devant nous à bord d’une pirogue avec un abri à l’avant et monta à bord du Providence. Il venait d’arriver de Morea et ce fut sa première visite aux navires ; à cette occasion, le capitaine Bligh le fit saluer de quelques coups de canons, ce qui lui fit extrêmement plaisir. Il rendit sa visite avec très peu de pompe et avait une suite très peu nombreuse en cette occasion. Dans le temps, cela se passait tout autrement car lorsqu’il venait au Resolution, il était généralement suivi de nombreuses pirogues et d’une grande partie des chefs ; les pirogues qui se trouvaient autour du navire se bousculaient toujours pour laisser la voie libre. Il doit être âgé maintenant et son fils Otoo un beau garçon plein de vitalité ; il est probable que le respect qui était montré autrefois au père, appartient maintenant au fils.  A six heures du soir, je montai à bord du Providence où je trouvai le roi, son père qui s’appelle Otou, Edéa et une autre des femmes du roi qui se nomme Whyréde ; cette dame est la sœur cadette d'Edéa et semble avoir entièrement pris sa place dans les affections du roi. Ce fut une joyeuse réunion de vieux amis et tellement leur joie était grande qu’elle se lisait alors clairement sur tous les visages ; peu d’entre eux, en parlant du sort qu’ils croyaient avoir été celui du capitaine Bligh et de ses compagnons, purent se retenir de pleurer ; le roi surtout, qui est un des hommes les plus aimables et les mieux disposés du monde, ne sut exprimer son bonheur devant cette visite inattendue du capitaine Bligh. Il a toujours l’air d’aller remarquablement bien et il est très aimé de ces sujets, mais en raison de son usage immodéré du vin et des alcools (ou quand il ne peut s’en procurer du yava) il se rend incapable de les servir ou de servir son pays. Uripia, son frère cadet (entre lui et le roi il semble avoir beaucoup d’amitié et d’affection) est l’homme qui gouverne et, en effet, d’après ce que j’ai pu observer de lui, je pense qu’il ne pourrait en exister un meilleur : il paraît vigilant et raisonnable et tous ses compatriotes admettent qu’il est un de leurs meilleurs guerriers. Il mesure environ cinq pieds dix pouces ; c’est un bel homme remarquablement fort et actif avec un air plein d’autorité.

Le commandant leur fit des présents appropriés ; je remontai à bord de l’Assistant ; le roi, son père, Edéa et Whyrede déménagèrent à bord du Providence pour la nuit. Les botanistes informèrent le capitaine Bligh qu’ils avaient trouvé un très bon endroit pour se procurer les plants d’arbres à pain, dans la vallée qui mène à la pointe sud, à partir de Matavia, distante d’environ un mille et demi.
Matin : Comme le soleil était très chaud et le capitaine Bligh souffrant, il ne s’aventura pas à terre. Je rendis visite au poste où je trouvai tout parfaitement en ordre et le travail en train de démarrer sur les maisons ; les travaux de nos propres gens qui creusaient une tranchée d’une largeur et d’une profondeur de quatre pieds avançaient aussi très bien. Pendant que je me trouvais au poste, le jeune roi Otoo arriva porté comme toujours sur les épaules d’un homme ; je lui fis un présent de la part de Bligh et un autre de ma part ; il ordonna à ses serviteurs de les recevoir (car il paraît qu’il ne prend jamais lui-même ce genre de chose en public) et en fut fort content. Il avait appris mon nom et le prononça, avec plusieurs mots anglais, très clairement ; il se comporta vraiment en ami et me pressa d’aller le voir à Oparre.  Ce prince doit avoir 13 ou 14 ans, je crois ; il est de belle stature et l’expression de son visage  commande déjà le respect de la population. Je pense qu’il possède un caractère très différent de celui de son père, ayant une tournure d’esprit active et vive.
L’Indien qui était retenu prisonnier à bord du Providence fut libéré à la demande du roi à condition qu’il ne revînt plus jamais aux navires. Le misérable, qui s’était attendu à être tué, accueillit sa libération avec toutes les démonstrations de joie et de reconnaissance qu’il put manifester, sauta dans l’eau et nagea jusqu’au rivage. A midi, de faibles brises d’ouest avec un temps chaud et lourd ; je remontai à bord du Providence et informai le capitaine Bligh de ce qui se passait à terre.

 

Le brick de sa Majesté l'Assistant dans la baie de Matavia, Otahiti. Le mercredi 18 avril 1792.


Après-midi : une faible brise du nord avec un temps chaud et lourd. L’équipage occupé aux tâches nécessaires à bord du navire ; aujourd’hui les provisions apportées par les naturels (et que nous achetons très bon marché) sont des noix de coco et des fruits à pain en abondance mais peu de cochons. Pour un clou long d’environ un pouce et demi, nous obtenons 6 ou 8 grosses têtes de fruits à pain, une tête par jour étant suffisante pour un homme et nous donnons le même genre de clou pour 8 ou 10 noix de coco ; habituellement une noix contient presque un litre d’une excellente boisson très saine que nous appelons généralement du lait. Le soir, j’accompagnai le capitaine Bligh à terre ; nous rendîmes visite au poste et découvrîmes que les botanistes avaient installé dans la maison des plantes 32 pots contenant chacun en moyenne deux beaux plants d’arbre à pain. Le temps était pluvieux et très favorable aux plants ; nous eûmes donc la satisfaction de voir cette entreprise, l’objet de notre voyage, bien débuter. L’après-midi, je pris à bord, sur l’ordre du capitaine Bligh, John  W…stnat, anciennement de la Matilda. Comme il était nu, je lui fournis du matériel de couchage et des vêtements. Au coucher du soleil, nous remontâmes à bord.  Matin : brises d’ouest modérées avec de la pluie.  J’employai le charpentier à faire un coffre à armes pour le cotre ou la chaloupe, le reste de l’équipage étaient occupé à faire de l’étoupe en préparation du calfatage du navire. Le roi, son père, sa mère et son épouse prirent affectueusement congé de nous et partirent passer la nuit à Oparre.

 

Le brick de sa Majesté l'Assistant dans la baie de Matavia, Otahiti. Le jeudi 19 avril 1792.


Après-midi : Vent variable faible de nord et d’ouest avec temps pluvieux.  Nos gens employés aux tâches nécessaires à bord des navires.  Le soir,  je rendis visite au poste et trouvai tout en bon ordre, les naturels se comportant de façon très amicale ; aujourd’hui, les botanistes ont installé dans la maison des plantes 83 pots avec des plants d’arbres à pain. Vers 7 heures, je remontai à bord. A 5 heures et demie du matin, conformément aux ordres du capitaine Bligh, nous larguâmes les amarres et levâmes l’ancre pour être toué vers la pointe Vénus et nous approcher du poste. A 7 heures, nous mouillâmes la meilleure ancre de bossoir par 10 brasses d’eau fond de fine sable noire et jetâmes l’ancre d’affourche à l'ouest-nord-ouest par 14 brasses ; le navire mouillé par 13 brasses de fond de sable noir. [illisible] à bord les positions suivantes furent relevées : l’arbre isolé à la pointe Vénus nord- 30°-est, le récif de la pointe Vénus nord-30°-ouest, la pointe d'Oparre sud-62°-ouest et le poste nord-[illisible]-est. A deux encablures du poste, nous sondâmes tout autour et trouvâmes le fond très bon. J’employai les matelots à fourrer les câbles et le charpentier à faire un coffre à armes ; comme d’habitude, les naturels sont d’une extrême amabilité et nous apportent des provisions de cochons, de fruits à pain et de noix de coco en quantités plus que suffisantes pour notre consommation quotidienne. Aujourd’hui, nous avons pu saler une barrique de deux demi-tonneaux de bon porc.  A midi, une petite brise d’est avec temps frais et agréable.

 

Le brick de sa Majesté l'Assistant dans la baie de Matavai, Otahiti. Le vendredi 20 avril 1792.


Matin : brise modérée d’est avec temps frais et agréable ; nous déverguâmes la grand-voile carrée. Le soir, j’accompagnai le capitaine Bligh à terre au poste où nous trouvâmes tout calme et en bon ordre ; nous traversâmes la rivière et, pendant notre promenade dans le district de Matavia, nous vîmes un pamplemoussier de bonne taille et plusieurs lianes de citrouilles. Notre promenade, bien qu’à travers un paysage magnifique, ne fut pas source de beaucoup de plaisir car le district était totalement désert à cause de la guerre : la vue de nombreuses maisons inhabitées, d’autres en ruines et le silence de ce que nous considérions jadis le joyeux et heureux district de Matavia ne pouvait que nous inspirer des réflexions sombres et de la peine pour le sort de ces pauvres gens chez qui nous avions été si heureux autrefois. Je suis certain que le capitaine Bligh partage leur détresse et fait tout ce qu’il peut pour réconcilier les partis ; je désire ardemment qu’il réussisse dans cette action bienveillante. Vers 6 heures du soir, nous remontâmes à bord du Providence où nous trouvâmes le roi, sa femme et ses serviteurs ; ils avaient apporté des présents pour le capitaine Bligh et s’installèrent à bord pour la nuit, [illisible] Pendant la nuit, nous eûmes un temps calme, chaud et lourd. Matin : nous déployâmes les voiles pour les sécher et les déverguer ; peu de pirogues mais celles qui sont là nous apportent une provision abondante de cochons, de fruits à pain mûrs et de plantains ; nous déverguâmes certaines petites voiles. A midi, brise modérée tournant sans cesse et temps clair avec nuages.

 

Le brick de sa Majesté l'Assistant dans la baie de Matavia, Otahiti. Le samedi 21 avril 1792.


Brises modérées et très variables, temps clair avec nuages. Après-midi : très peu de pirogues dans la baie ; nous déverguâmes la civadière avant et la grand-voile avant et arrière. Selon le rapport du chirurgien, plusieurs membres d'équipage se plaignent de beaucoup de crampes et de diarrhées ; il pense que c’est dû aux vivre frais et aux fruits que nous recevons en abondance. A minuit, petites brises variables avec temps frais et agréable. Matin : brises d’est modérées avec beau temps, une grosse houle dans la baie, le ressac était très fort sur les plages, les vagues se brisant souvent dans deux brasses d’eau sur le Dolphin Bank et sur le banc entre le cap Taraa et la pointe Mori à Oparre. Tôt le matin, j’accompagnai le commandant au poste ; le ressac était si fort sur la plage d’en face qu’il devint difficile de débarquer. Nous doublâmes donc à la pagaie la pointe Vénus et débarquâmes près de la source de la rivière où c’était assez calme. Le capitaine Bligh, estimant que les plants étaient ramassés un peu trop tard dans la journée, recommanda aux botanistes d’être sur place pour les cueillir le matin à l’aube pour qu’ils fussent ramassés et rapportés avant l’arrivée de la chaleur de la journée. Il leur conseilla également de prendre bien soin d’obtenir les différentes sortes de plants de l’arbre à pain car il en existe une grande variété et certaines sortes deviennent beaucoup plus grandes et plus belles que d’autres. Ils adoptèrent cette stratégie et, à midi, le nombre de pots dans la maison des plantes était de quatre cents, cinq ne contenaient qu’un seul plant mais la plupart en contenait deux ou trois. A midi, nous remontâmes à bord et trouvâmes très peu de pirogues ou de visiteurs autour des navires et, bien sûr, très peu de commerce en cours. Alizé très agréable et beau temps ; peu de gens dans les plaines de Matavia ; ce lieu magnifique à l’air véritablement désert.

 

Le brick de sa Majesté l'Assistant dans la baie de Matavia, Otahiti. Le dimanche 22 avril 1792.  


Matin : belle brise avec temps agréable ; l’équipage occupé à faire de l’étoupe et à réparer des voiles. [illisible] l’après-midi, j’accompagnai le capitaine Bligh à terre au poste où nous trouvâmes tout calme et en ordre. Au cours de la journée, on apporta au capitaine Bligh plusieurs pamplemousses bien formés : ils étaient gros mais, malheureusement, avaient été cueilli avant maturité ; ils seraient sans doute devenus très beaux s’ils étaient restés quelques semaines de plus sur l’arbre. Leur taille laisse subsister peu de doutes sur le fait que le sol et le climat leur conviennent. Les naturels, hormis Edéa, ne semblent pas les apprécier ; peut-être ne les ont-ils jamais mangés à pleine maturité. Vers 7 heures, nous remontâmes de nouveau à bord et, pendant la nuit, eûmes des vents faibles et du beau temps. A trois heures du matin, les officiers de quart m’appelèrent parce que deux grandes pirogues à voile entraient dans la baie et s’approchaient des navires ; ils passèrent devant nous et poursuivirent vers la pointe Vénus. (Messieurs Tobin, Harwood, Frankland et Norris, lors d’une excursion de 4 ou 5 milles dans la vallée de Matavia, virent de nombreux pamplemoussiers et ce qu’ils pensaient être des orangers) mais, en ce qui concerne les orangers, je crois qu’ils se trompent car je ne pense pas qu’il en existe d’autres sur l’île que les très jeunes que nous venons de débarquer. A la fin de leur marche, ils furent rejoints par un groupe d’une trentaine d’aimables personnes de Matavia ; ces pauvres gens se dirent très heureux de rencontrer leurs amis de Bretania et se comportèrent de la façon la plus amicale que l’on puisse imaginer en se lamentant beaucoup du fait que les troubles actuels les empêchaient d’être plus près des vaisseaux.  Ils accompagnèrent ces messieurs sur une partie du chemin du retour mais on ne put les convaincre d’entrer dans le poste par crainte de leurs ennemis, les gens d'Oparre.  Ils prirent amicalement congé, regagnèrent leur lieux de sureté et les messieurs retournèrent au poste. Vers neuf heures et demie, la brise de mer, ou d’est, s’établit avec du beau temps agréable.  A midi, j’accompagnai le commandant à terre ou tout était calme et en ordre ; les botanistes ont installé 730 pots de plants de fruits à pain. Au poste, nous retrouvâmes Otoo qui était assez content de nous voir ; il paraissait (malgré ses scrupules l’autre jour à recevoir des présents avec ses propres mains) beaucoup aimer mendier des canifs et les chercher. Son père, avec la plupart des autres chefs, est à Oparre. Otoo resta quelques heures avec nous ; il était très heureux de la façon dont il fut traité et retourna à Oparre tout joyeux [illisible]

 

le lundi 23 avril 1792


Pendant toutes ces dernières 24 heures, de faibles brises d’est avec beau temps. L'après-midi, nous remontâmes à bord et trouvâmes très peu de visiteurs autour des navires.  Malgré le peu de gens aujourd’hui, nous nous sommes cependant procuré auprès d'eux trois beaux cochons en plus d’une abondance de noix de coco et de fruits à pain préparés. Nous encourageons les naturels à apporter leurs fruits à pain déjà préparés car leur méthode de cuisson les rend beaucoup plus agréable au goût que la nôtre. Vers 5 heures de l’après-midi, j’accompagnai le commandant à terre au poste où nous trouvâmes tout calme et en ordre ; nous fîmes une courte excursion dans la vallée de Matavia où nous vîmes plusieurs familles d'Oparre en train de construire des maisons dans des endroits où d’autres avaient été démolies ou incendiées. Les arbres à pain, dont la vallée regorge de façon étonnante, étaient couverts de fruits à pleine maturité et les différentes familles étaient en train de les cueillir et d’en faire du mahee. Les naturels apprécient beaucoup le mahee et s’en servent comme d’un genre de pain pendant les courtes saisons où le fruit à pain n’est pas mûr. Ils le préparent de la manière suivante : quand le fruit est à maturité, mais pas encore mou ou trop mûr, de grandes quantités  de fruits sont cueillies ; ils sont grattés à l’aide d’un bambou fendu pour en enlever complètement la peau et, lorsqu’un nombre suffisant de fruits a été préparé de cette manière, on creuse un trou dans la terre, dont la profondeur et la taille dépendent du nombre de fruits, et on le tapisse de feuilles vertes (ces feuilles viennent de la plante du gingembre ou du curcuma, je pense). Les fruits restent en tas jusqu’à ce qu’ils se ramollissent ; ils sont alors cassé en morceaux, le coeur en est enlevé et ils sont épluchés et entassés dans le trou de façon très serrée avant d’être bien recouverts d’une épaisse couche de feuilles et d’un poids important de pierres et de terre.  Deux ou trois semaines plus tard, ceci est prêt à l’emploi ; il est enlevé et enveloppé dans des feuilles d’arbres à pain propres avant d’être cuit. Bien préparé, il fournit une sorte de pain très plaisant qui possède un goût acide agréable. Les naturels l’apprécient énormément et la plupart d’entre eux le préfèrent à toute autre sorte de pain. Lors de cette courte promenade, nous vîmes de nombreux beaux arbres à pain et ave, ou pommiers, complètement détruits par des encoches faites tout autour du tronc ; une pratique qui, nous le découvrîmes, était adoptée par les gens d'Oparre afin de gêner ceux de Matavia ; je suppose que cette pratique est généralisée chez des partis en guerre.  Les petits groupes que nous rencontrâmes se conduisirent de la façon la plus aimable ; nous leur distribuâmes des présents et, vers la tombée du jour, nous retournâmes au poste où le capitaine Bligh donna les ordres nécessaires ; ensuite, nous remontâmes à bord. Pendant la nuit nous eûmes un temps calme et clair. A cinq heures et demie, il faisait bien jour ; je fis  réveiller tout le monde et nous commençâmes à laver et à nettoyer le navire. L’équipage fut employé à remonter les câbles de tribord et à remplir les tonneaux d’eau qui se trouvaient en-dessous ; nous récupérâmes des charbons sous les tonneaux à pain et les mîmes dans la cale à charbon.  A 11 heures du matin, j’envoyai le fusilier marin Peter Mulberry à bord, sous la garde du caporal Rear, avec une plainte de l’officier, le lieutenant Guthrie, déclarant qu’il avait perdu une cartouche entière de sa boîte à cartouche et une de ses chemises et qu’il y avait tout lieu de supposer qu’ils les avaient vendues aux Indiens. Nous avions eu plusieurs cas au poste de chefs qui tentaient de se procurer des commodités auprès des fusiliers marins et, comme il aurait été facile pour d’autres, [illisible] de la totalité, d’adopter cette stratégie pour  leur en donner en faisant croire qu’ils étaient perdus, il devenait fort nécessaire de faire un exemple de cet homme, en particulier parce que les officiers étaient d’avis qu’il avait réellement vendu ces choses [illisible] 18 coups de fouet pour ces crimes et il fut ramené à terre pour reprendre son service. A midi, une petite brise avec beau temps.

 

Le brick de sa Majesté l'Assistant dans la baie de Matavia, Otahiti. Le mardi 24 avril 1792.


Faibles brises variables pendant la plupart des ces dernières 24 heures, avec beau temps. L’après-midi, nous terminâmes le côté tribord de la cale principale et lovâmes les câbles. Le matin, nous remontâmes les câbles de l’ancre d’affourche, remplîmes d’eau l’espace en-dessous, mîmes des charbons dans la cale à charbon et lovâmes les câbles de nouveau. [illisible] Les naturels autour de nous peu nombreux et très aimables. A midi, brises modérées avec temps agréable.

 

Le brick de sa Majesté l'Assistant dans la baie de Matavia, Otahiti. Le mercredi 25 avril 1792.


Petites brises d’est et temps agréable et clair avec nuages. L’équipage employé à ranger les cales et à ramener de l’eau. L’après-midi vers 5 heures, j’accompagnai le capitaine Bligh au poste où nous trouvâmes tout calme et en ordre. Le nombre de pots dans la salle des plantes est de 850 ce soir, beaucoup de plants commencent à se flétrir mais les botanistes me disent que cela est normal avant qu’ils ne prennent racine dans les pots. Vers 7 heures, nous remontâmes de nouveau à bord et pendant la nuit eûmes des brises d’est modérées avec un temps agréable. Vers 6 heures du matin, nous redescendîmes à terre au poste où nous trouvâmes Otoo ; il avait dormi dans le district de Matavia la nuit précédente, comme avaient fait son père et plusieurs des principaux chefs d'Oparre qui semblent maintenant se considérer comme étant les propriétaires des maisons et des plantations des gens de Matavia. En plus des chefs, beaucoup d’autres personnes de la classe moyenne d'Oparre sont en train de se rassembler autour de Matavia et de se construire des maisons aux endroits où les maisons ont été incendiées ou autrement détruites pendant les guerres. Combien de temps ils en conserveront la possession après notre départ est très incertain car il fait peu de doute que les gens de Matavia  tenteront de regagner leurs terres. Peut-être, aidés d’un autre district, dont la population est motivée par l’espoir d’obtenir une partie des [illisible] des gens de Matavia et  qui, en obtenant satisfaction, s’allierait avec eux, qu’ils retourneront la situation au dépens des gens d'Oparre.  C’est cela qui semble le plus probable car on considère que les meilleurs guerriers des deux districts sont ceux de Matavia et, à l’est, il y a plusieurs districts plus petits  qui semblent disposés à se joindre aux gens de Matavia. En effet, un ou deux les avaient déjà rejoints et d’autres auraient suivi leur exemple mais en furent empêchés par notre arrivée dans la baie, car ils connaissaient l’amitié du capitaine Bligh pour la famille d'Otoo et la population d'Oparre.

 

Le brick de sa Majesté l'Assistant dans la baie de Matavia, Otahiti. Le jeudi 26 avril 1792.


Vents faibles et variables avec quelques averses de pluie [illisible] le rangement de la cale et j’employai les charpentiers à installer des [illisible] les nœuds à la place de ceux emportés par les vagues en mer ; pendant la nuit, nous eûmes des vents faibles et variables avec [illisible] le capitaine Bligh à terre ; l’instabilité du temps occasionna [illisible] ressac sur les plages il [illisible] nous ne pouvions débarquer sans courir un grand danger que les bateaux se remplissent [illisible] autour de la pointe Vénus [illisible] rivage à l’est [illisible] et pas le temps [illisible] plaisir à nous promener, nous fûmes bientôt rejoints par beaucoup d’autres [illisible] qui pouvait être et d’autres [illisible] était leur pirogue sacrée [illisible] mettre le première partie de [illisible] contient des nattes et des plumes et, je le suppose, bien d’autres choses [illisible] respect et estime par eux, le vieux grand-prêtre s’approcha et avec beaucoup de respect et de cérémonie et aussi [illisible] ils s’imaginent que leur Dieu plane au-dessus de ce prince et leurs présents de plumes rouges [illisible] choses précieuses offertes [illisible] y sont toutes déposées ; le grand-prêtre portait avec lui quelques plumes rouges attachées ensemble et proprement fixées au bout d’un [illisible] jonc ou bambou qu’il déposa dans la pirogue ; ensuite il commença ses prières sur un ton de voix chantant, accompagné de deux tambours et, comme il lui manquait un batteur, il semblait vouloir qu’un homme appartenant au navire du capitaine Bligh et qui nous avait aussi accompagnés battît un des tambours.  L’homme accepta volontiers, joua très bien et donna beaucoup de satisfaction au grand-prêtre. Nous y restâmes environ une demi-heure et, ensuite, nous retournâmes par le même chemin ; le roi [illisible] qui, lorsque nous nous étions approchés de la pirogue sacrée, s’était assis à l’ombre d’un palmier. Nous rendîmes alors visite au poste où nous trouvâmes tout calme et en bon ordre, les naturels se comportant de la manière la plus aimable. Ce matin-là, je comptai le nombre de pots avec des plants d’arbre à pain : il y en a 985 dans la salle des plantes, la plupart contenant deux plants. A neuf heures, nous remontâmes à bord ; il y avait peu de pirogues autour du navire aujourd’hui et une maigre provision de cochons, de fruits à pain et de noix de coco.  Aujourd’hui, le charpentier a commencé à calfater les flancs ; le reste de l’équipage employé à faire de l’étoupe et du bitord. A midi, petite brise marine avec un temps chaud.    

 

Le vendredi 27 avril 1792


Après-midi : petite brise et temps clair avec nuages. Les charpentiers occupés à calfater le flanc et les matelots à préparer les vieux cordages. Vers 5 heures, j’accompagnai le commandant à terre au poste où nous trouvâmes tout calme et en ordre. Environ 1000 pots avec les plants d’arbres à pain dans la salle des plantes. Dans la nuit, nous eûmes un temps calme et beau et une grosse houle dans la baie qui rend le ressac sur la plage très fort. Matin :  employés à préparer les vieux cordages, à calfater les flancs et à saler du porc. A ce jour, nous avons salé depuis notre arrivée une totale de deux barriques d’un tonneau et d’une d’un demi-tonneau de très bon porc. Aujourd’hui, PoeE’noe, le chef de Matavia, vint solliciter la paix auprès du roi, ce qui lui fut accordé à condition que PoéE’noe apportât les armes à feu et l’argent qu’il a en sa possession et qui appartiennent au commandant de l’ancien vaisseau la Mathilda. Il consentit à ces termes et le roi et lui se sont frottés le nez en signe d’amitié l’un pour l’autre ; personnellement, je pense qu’ils se détestent et que PoéE’noe n’a pas l’intention de respecter les conditions de paix. Le matin, nous eûmes des vents faibles et variables avec un temps chaud ; j’envoyai les [illisible] les naturels en très petit nombre et la provision de vivres plutôt maigre. [illisible]  sacs séchés et nettoyés en bas.

                                                    

Le samedi 28 avril 1792


Matin : brise de mer modérée avec un temps chaud. Les charpentiers occupés à calfater et les matelots à préparer les vieux cordages. Vers une heure, Maa’hoo, un ami du roi, monta à bord du Providence ; il venait d’arriver de Morea dont il est le chef principal et, d’après ce que j’ai pu apprendre, il avait été envoyé il y a quelques jours à Morea pour tuer un homme et le ramener à Oparre où il devait être offert à leurs dieux en tant que sacrifice en remerciement  de leur réussite dans la récente guerre avec la population de Matavia ; une autre partie de sa mission fut de demander aux gens de Morea de venir avec leurs cochons &c pour les vendre aux navires. Maa’hoo, le roi, et ses deux femmes dînèrent avec nous avant de se rendre à terre au poste. Actuellement, nous remarquons une coutume qui, il me semble, n’était pas observée auparavant : la reine Edéa boit de grandes quantités de yava ; je n’ai pas vu d’autre femme observer cette pratique. Vers 5 heures, j’accompagnai le capitaine Bligh au poste où nous trouvâmes tout calme et en ordre ; après avoir fait une courte promenade, nous revînmes de nouveau laissant les naturels dans tout le voisinage du poste très bien disposés à notre égard.  Pendant notre promenade, nous passâmes devant une maison où se trouvaient Poo’e’noe et d’autres chefs de Matavia ; nous n’eûmes pas de contact avec eux car le capitaine Bligh évitait de parler à Poo’e’noe tant qu’il n’aurait pas rempli les conditions de paix.  Il envoya un messager au capitaine Bligh pour lui demander la permission de lui rendre visite le lendemain matin ; celle-ci lui fut accordée à condition qu’il rendît l’argent et les fusils. Dans la nuit, nous eûmes une petite brise avec du beau temps. Vers 7 heures du matin, le capitaine Bligh, accompagné du roi, de ses deux femmes et de certains officiers du Providence, se rendit à Oparre afin d’assister à la cérémonie de l’offrande de remerciement. Je ne pus être présent parce que le capitaine Bligh voulait que je reste sur place pendant son absence. Vers 8 heures, je rendis visite au poste et l’officier m’apprit qu'Edéa’a et U’re’pe’aa avaient dormi au poste la nuit précédente et qu'U’re’pe’a avait sollicité le sergent des fusiliers marins pour avoir quelques cinq cartouches de poudre ; on l’avait découvert aussi en train d’essayer de soudoyer l'une des sentinelles. Celle-ci avait commis l’erreur de le laisser s’approcher et soit il avait la main sur l’épaule d'U’re’pe’aa soit il lui serrait la main. A cause de ce manque d’attention pendant sa garde, la sentinelle fut relevée de ses fonctions et resta prisonnière jusqu’à ce qu’un rapport fût fait au capitaine Bligh. L’équipage occupé le matin à réparer et à laver leurs vêtements. A midi, une agréable brise de mer et beau temps ; aucun approvisionnement en cochons ces dernières 24 heures. M. White, le second du chirurgien du Providence, fut victime du vol d’un foulard et de 4 autres articles mais il ne subit aucune violence.

 

Le brick de sa Majesté l'Assistant dans la baie de Matavia, Otahiti. Le dimanche 29 avril 1792.


Après-midi : brise d’est modérée avec un temps très agréable. Aucune pirogue autour du navire. A une heure de l’après-midi, le capitaine Bligh revint d'Oparre. Dans l’après-midi, je reçus de Why’re’de, une des femmes du roi, un présent composé d’un gros cochon et de noix de coco ; je lui fis un retour approprié. Vers 4 heures, j’accompagnai le capitaine Bligh au poste et trouvai tout parfaitement calme ; je lui répétai les circonstances de ce qui s’était passé la nuit précédente par rapport au comportement d'U’re’pe’aa au poste ;  la sentinelle reprit ses fonctions car il apparut qu’elle n’était pas en train de serrer la main à U’re’pe’aa mais de le tenir à distance avec la main. Le capitaine Bligh donna l’ordre de faire particulièrement attention au guet et il conseilla aux officiers d’éviter trop de familiarité avec les naturels et de rester sur leurs gardes avec eux. Nous retournâmes à bord vers 7 heures du soir ; temps calme et clair pendant la nuit.  Matin : brise marine modérée, très peu de pirogues, aucun cochon et peu de noix de coco à acheter. Je donnai la permission à une partie de l’équipage d’aller à terre.

                                                

Le lundi 30 avril 1792   


Après-midi : petite brise marine avec beau temps. Cette après-midi, je reçus une visite du roi et de ses femmes ; ils me firent chacun présent d’un gros cochon et d’une quantité de fruits à pain et de noix de coco et de quelques pièces d’étoffe otahitienne. Je leur fis un présent  convenable en retour et le soir, ils s’en allèrent fort contents des attentions qu’ils avaient reçues. Vers la tombée de la nuit, j’accompagnai le commandant à terre au poste où nous fûmes rejoints par le roi et d’autres chefs ; nous trouvâmes tout parfaitement calme et les naturels se comportant de la manière la plus aimable. Les hommes en permission sont tous revenus à bord et, pendant la nuit, nous eûmes des vents faibles avec un temps chaud. Matin : vents faibles et variables ; nous obtînmes une petite provision de cochons ; j’employai quelques membres d'équipage à saler du porc et à déployer les voiles pour les aérer ; je fis ramener de l’eau pour l’utilisation immédiate et employai l’équipage aux différents tâches nécessaires à bord.  Messieurs John, Harwood et Frankland chavirèrent dans une pirogue en descendant à terre ; j’envoyai un bateau à leur secours. Tous eurent la vie sauve.

 

Le brick de sa Majesté l'Assistant dans la baie de Matavia, Otahiti.
Le mardi 7 mai 1792 (après cette date le journal est écrit par quelqu’un d’autre ; détails sur le travail à bord seulement)


Après-midi : occupé comme auparavant.  Amenâmes le mât de perroquet de la hune de misaine sur le pont, grattâmes et graissâmes [illisible] & occupé à remettre en état et à réparer les défauts & à goudronner le cordage du gréément du perroquet de la hune de misaine, nouveaux bras pour le perroquet de la hune de misaine. A 11 heures, hissâmes le mât du perroquet de la hune de misaine, gratté et graissé le mât de la vergue de misaine, goudronné les barres de hune, la tête du mât de hune et les bois des mâts de la hune de misaine. Les charpentiers occupés comme auparavant ; quelques naturels faisant du commerce comme d’habitude.


   
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